aux chiottes!

27 avril 2011

un tableau de chasse

Comme dit Michaël Handelzalts (dans Histoires d’en lire, Gallimard,  2001), qui pose de vraies questions, il rassure “tous les lecteurs impénitents, les amoureux inconditionnels, les drogués  inguérissables, livre (!) des réponses à leurs problèmes existentiels : quelle  position adopter dans son lit avec un roman, a-t-on le droit de lire aux toilettes, etc.”, a-t-on le droit de lire aux toilettes ? je répond : “oui” et pourquoi un journal à lire au chiotte me direz-vous ?
C’est simple : c’est en ce lieu sacré,  où trônèrent bon nombre de personnes célèbre (et moins), que m’apparaissent tous les fondements de mes meilleurs idées. Alors ce numéro UN va faire en sorte de vous convaincre quand au bien fait de lire au chiotte. Rassurez-vous, pas de long discours, très peu d’arguments fondés, encore moins de tirades constipées; juste quelques croquis, quelques références bibliographiques, quelques jeux de lettres (l’U rit noir, pour vous mettre l’O à la douche)…
D’ailleurs, Arthur Rimbaud n’a-t-il pas écrit L’Idole, Sonnet du Trou du Cul aux gogues?

COMPRENDRE
Pour comprendre cette habitude de lecture, je dois remonter aux sources. Prenons le premier homme qui a chié (quelle tête a-t-il dû faire? nous énonce Jean Carmet dans les brèves de comptoir de Palace), pas sûr qu’il fussent à ses aises pour bouquiner, pas sûr qu’il sacha lire non plus.
Passons. Un bon vers nos ancêtres de la Grèce antique pour qui le dépôt d’oboles était déjà sacré; quelques traces (!) de constructions domestiques laissent entrevoir des lieux communs mais pas encore de pupitres recevant tablette d’argile. Biensur qu’il fussent occupé à pousser le plat de la veille plutôt qu’à lire l’odyssée aux chiottes… Un bon en avant pour atterrir en 50 avant J-C, toute la Gaule est occupée par les Romains. Toute, sauf un petit village breton où vivent entre autres, Astérix, un petit guerrier malicieux et valeureux, son ami Obélix, un tailleur de menhir, qui se définit lui-même comme “un petit peu enveloppé”, et d’une force surhumaine, depuis qu’il est tombé dans une marmite de potion magique alors qu’il était enfant. Le Chef du village s’appelle Abraracourcix, le druide Panoramix a un “don” miraculeux, en effet, il est le seul à connaître la formule pour fabriquer la fameuse potion magique qui rend tous les villageois constipés. Détritus, gouverneur de la région, et Caius Bonus, commandant du camp de Petitbonum, n’osent pas avouer à César la présence de cet îlot de résistants… Ce n’est donc pas ici que je trouverai une piste pour mes recherches.
Quelques guerres et paix plus tard, le témoignage du plombier de Louis XVI nous laisse entrevoir la passion du Roy pour son trône mais aussi pour la littérature. Comme l’observent Paul et Pierrette Girault de Coursac (couple de plombiers, amis de louis XVI), il y a quelque  chose d’impossible dans le portrait qui est habituellement fait de Louis  XVI… Comme s’il s’agissait en fait bien davantage d’une caricature  grotesque que d’un portrait un tant soit peu objectif…
“Il est impossible que le corps et l’esprit d’un être humain soient parvenus à rassembler une pareille quantité de défauts épouvantables : [Louis XVI ] est très ignorant, il est rude, il est grossier, il est sans éducation, sans curiosité, il est maladroit, il n’a de goût que pour les choses et les travaux les plus grossiers, il est gauche, il est timide, embarrassé, il est de caractère faible et indécis, il se laisse gouverner par sa femme et par ses ministres, il est énorme, il est ventripotent, il mange trop, il est ivrogne, il est sale, il est impuissant, il lui a fallu une opération pour avoir des enfants, et encore on n’est pas sûr qu’ils soient de lui, il est cocu, il écoute toujours le dernier qui a parlé, c’est une bulle de savon, ses idées sont sans consistance, ce sont des boules de billard huilées qu’on n’arrive pas à faire tenir ensemble.” J’en conclu donc que l’hypothèse qu’il lisait au chiotte est envisageable… Eut-il fallut qu’il y eu des chiottes à Versailles…
Ce n’est que dans la fin des années 60 que j’ai pu entendre pour la première fois Jacky Bouillon, habitant dans un joli pavillon de la banlieue de Jonzac, s’exclamer en réponse à sa femme : “t’étais où? t’en a mis un temps !”, lui : “bah ,c’est parce que je lis aux chiottes”, elle : “ah ok…, tu viens à table ?”. Je suis actuellement à la recherche de Jacky Bouillon, pour dater plus précisément cet événement majeur de la lecture aux chiottes. Affaire à suivre…

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